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    mardi, 01 février 2022 09:07

    Par un avis du 1er décembre 2021, la chambre commerciale de la Cour de cassation a tranché une question longuement débattue par la doctrine : L’usufruitier est-il associé ?

    Écrit par Me Valentine Wirig

    Michilus AH2204B Usufruit

    Dessin: Michel Szlazak

    Par cet avis, elle y répond de manière ferme puisqu’elle énonce que « L’usufruitier de parts sociales ne peut se voir reconnaitre la qualité d’associé » mettant ainsi fin au doute qui subsistait sur le statut de l’usufruitier.

    En effet, la Cour jusqu’à présent avait gardé le silence sur le statut lui-même de l’usufruitier. Les décisions rendues concernaient pour l’essentiel les droits de celui-ci dans le partage des bénéfices.

    La Cour rend son avis au visa de l’article 578 du Code civil qui dispose que :

    « L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre à la propriété, comme le propriétaire lui-même mais à charge d’en conserver la substance ».

    Elle en déduit que l’usufruitier n’est pas le propriétaire des parts sociales, puisque cette qualité appartient au nu-propriétaire. Dès lors, et en toute logique, seul le nu-propriétaire a la qualité d’associé. En revanche, l’usufruitier jouit de la qualité d’associé « comme le propriétaire lui-même ». Il bénéficie ainsi des droits attachés à cette qualité.

    La chambre commerciale en tire les conséquences suivantes : « L’usufruitier de parts sociales peut provoquer une délibération des associés ayant pour objet la révocation du gérant et la nomination de co-gérant, en application de l’article 39 du décret du 3 juillet 1978, si cette délibération est susceptible d’avoir une incidence directe sur son droit de jouissance des parts sociales. ».

    Elle affirme ainsi que l’usufruitier est amené à intervenir dans la vie de la société en dehors de la distribution de dividende, mais pour ne pas léser le nu-propriétaire elle pose deux limites :

    -La délibération doit avoir une incidence sur le droit de jouissance des parts sociales ;

    -L’incidence doit être directe.

    S’agissant du premier critère, celui-ci est semble-t-il entendu largement puisque la Cour considère que la délibération doit être « susceptible » d’avoir une incidence sur le droit de jouissance de l’usufruitier. Il n’est donc pas nécessaire de prouver que la délibération a une incidence certaine mais simplement de démontrer qu’elle pourrait en avoir une. En revanche, le second critère semble être entendu plus strictement puisque la Cour précise que l’incidence doit être directe.

    Pour autant, aucune définition ou précision n’est donnée sur la manière dont sera appréciée l’incidence directe.

    Pour avoir plus de précision, il faudra donc attendre la décision de la troisième chambre civile qui avait sollicité cet avis. En l’espèce, provoquer une délibération des associés en vue de la révocation du gérant et la nomination de cogérant nous semble assez éloignée de toute idée « d’incidence directe sur la jouissance des parts sociales de l’usufruitier ». Reste à voir ce que la troisième chambre civile en conclura au vu de la situation qui lui est soumise. La suite au prochain épisode !